La chaussée romaine, une route mythique

20/01/2019 14:07

 

Cette ancienne route, appelée parfois chaussée Brunehaut, traverse les terres les plus riches du Hainaut, du Brabant-wallon et de la Hesbaye. Son importance fut  primordiale au cours de nombreux siècles.
 

Importance stratégique

Non seulement les armées romaines  l’ont abondamment empruntée mais aussi  les Francs et les Hongrois. A l’époque moderne, ce sont les troupes Espagnoles, Françaises, Hollandaises et Autrichiennes qui  l’ont utilisée pour leurs opérations militaires. Jusqu’aux envahisseurs de 1914, pour conduire leur charroi plutôt que par d’autres routes.

Importance économique

Elle a servi pour le transit de produits agricoles et industriels. Céramiques de la Gaule et de la Rhénanie, huiles et vins d’Espagne, bronze du bassin du Rhône et d’Italie, verrerie de Cologne…

Importance administrative

Fonctionnaires, agents territoriaux, courriers, appréciaient la vitesse que ses qualités de stabilité et son tracé rectiligne permettaient.

Mais  c’est peut-être au plan culturel qu’elle a joué un rôle essentiel et durable. Missionnaires, clercs, moines, artisans et commerçants ont véhiculé des idées et diffusé leurs connaissances et leur savoir au même titre que des marchandises.

 

Contexte historique

 

A l’origine, une piste gauloise

La chaussée romaine ne fut que la remise en état  d’une ancienne piste gauloise. Bien avant la conquête de la Gaule par Jules César (entre 58 et 51 av. J.-C), la Gaule septentrionale connaissait un âge d’or. Villes et places fortes (oppidum)  s’y étaient multipliées. Déjà alors, une route reliait Bavay à Tongres. Elle en croisait une autre reliant Nivelles à Lesves, une localité située à 14 km de Namur.

Trois siècles au moins avant J.-C. la région fut occupée par les Belges, une population Celte qui occupait la Gaule septentrionale (principalement la Gaule belgique) comprise, au nord de la Seine, entre la Manche et le Rhin. Cette invasion ruina la civilisation gauloise qui avait connu son âge d’or. Mais c’est bien aux gaulois que l’on doit la construction de la piste qui reliait déjà  Bavay à Tongres.

Mal  entretenue et devenue fort médiocre, cette route fut néanmoins utilisée vers 100 av. J.-C  par d’autres envahisseurs : les Cimbres (originaires du Danemark) et les Teutons (originaires des côtes de la Baltique) en quête d’une nouvelle terre. Rejetés par les romains et les Belges, ils ne parviendront pas à se fixer. Ils errèrent plusieurs années en Gaule, pillant et détruisant la région. Ils gagnèrent ensuite l’Italie où ils seront défaits par les armées de Marius. L’invasion chez nous était terminée mais la Gaule irrémédiablement ruinée !

 

L’époque romaine

Auguste, le premier empereur romain, organisa ensuite le territoire à partir de l’an 27 avant notre ère. Deux grandes voies partaient de Lyon, la capitale des Gaules : l’une se dirigeait vers le N-O pour atteindre la mer à Boulogne, l’autre vers le N-E pour rejoindre le Rhin à Cologne.

Celle dont il est question ici est transversale et assurait la liaison entre ces deux axes pour relier Boulogne à Cologne. Commencée une vingtaine d’années avant notre ère, les romains réparèrent ici une ancienne piste gauloise et la rehaussèrent pour la protéger des inondations. Les techniques les plus avancées en matière de génie civil furent appliquées par les ingénieurs romains.

Ils en firent un chef d’œuvre de durabilité. C’est ainsi qu’une antique piste gauloise devint une des meilleures routes de tous les temps…

Large d’une quinzaine de mètres,  ce qui est rare pour l’époque, solidement construite, bien empierrée, à l’abri des inondations, elle supporta au cours des siècles un trafic important. Les légions romaines pouvaient ainsi parcourir de 30 à 40 km. par jour.

De cette voie, partaient des embranchements  - les diverticula-  qui menaient vers d’autres routes, plus modestes, ou aux exploitations agricoles (les villas) de la région.

Cette chaussée déroule son parcours sur environ 400 km.de la France à l’Allemagne, en passant par la Belgique et les Pays-Bas. Elle traverse notre pays d’ouest en couvrant 4 des 5 provinces wallonnes sur  125 km. C’est l’une des sept chaussées rayonnant autour de Bavay.

 

 

La chaussée romaine vers Penteville (ca 1962).

Et ensuite…

On peut  aisément s’imaginer le mouvement que cette chaussée a connu. Des soldats, des fonctionnaires territoriaux, des marchands, des brigands aussi. Et à de multiples reprises des hordes d’envahisseurs qui profitaient de ce couloir d’invasion, comme les Normands en 880, les Hongrois en 954, jusqu’à l’époque moderne lors des batailles de Fleurus, de Ligny et de Ramillies…jusqu’aux Allemands, le 21 août 1914, pour rejoindre la Sambre du côté de Tamines.

A Gembloux, cette chaussée longe la ville sur une longueur de 10 km. Située à l’altitude de 160 m. elle garde sa caractéristique de ligne de crête. Elle sépare d’ailleurs les deux grands bassins hydrographiques de notre pays : celui de l’Escaut au nord et celui de la Meuse au sud.

 Son état actuel est hélas fort dégradé. Tout passe…

 

Les amateurs d’histoire locale découvriront, à pied ou en vélo, comme nous y invite Gaston Mauroy , les étapes marquantes tout au long de cette route historique sur le territoire de Gembloux. Il présente avec talent et d’une façon bien documentée des lieux tels que Bertinchamps,  Penteville, l’Agasse,  le « Ratint-Tot,  Baudecet et le bois de Buis qui bordent cette route sur le territoire de Gembloux.

 

 

Sources :

Flashes sur l’histoire de Gembloux (Abbé Joseph Toussaint) in « l’Orneau ».

Bulletin n° 89 (2016) du CRAHG (s) Gaston Mauroy.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Chauss%C3%A9e_romaine_de_Bavay_%C3%A0_Cologne